Le marché du FCT sous pression (chiffres 2023)
Les ventes frontalières plus que jamais mises à mal
Selon les chiffres du commerce de gros, le marché du tabac fine cut (Fine Cut Tobacco, ou FCT) a connu une baisse de 16,5% en 2023 par rapport à 2022 (3.043 tonnes par rapport à 3.646 tonnes), et 2022 enregistrait déjà une dégringolade de 25,3% par rapport à 2021. Les années précédentes se sont également soldées sur des résultats dans le rouge. Il y a dix ans, on écoulait facilement 10.000 tonnes. Le marché des cigarettes est également sous pression depuis des années: 7,190 millions de bâtonnets ont été vendus en 2023, contre 7,836 millions en 2022. Selon les statistiques du SPF Finances, qui ne sont actuellement disponibles que jusqu'en novembre 2023, le volume de tabac à fumer a baissé de 14% pendant cette période, et le volume de cigarettes de 9,9%.
Un marché plus petit qu'au Luxembourg
En termes de volume, le marché luxembourgeois est actuellement encore plus important que les marchés belge et néerlandais. En Belgique, quelque 14 milliards de bâtonnets sont mis en circulation (cigarettes et tabac, convertis en bâtonnets) sur une base annuelle; au Luxembourg, on en compte 16 milliards. Le Luxembourg, une petite économie qui repose sur l'essence, le tabac, l'alcool et un peu de tourisme, voit ses prix augmenter progressivement, car le but est de maintenir ces catégories dans son économie.
La Belgique pas, apparemment. Et dans cette manœuvre maladroite, le gouvernement semble oublier que cette catégorie représente encore 3 milliards d'euros de recettes par an. Une politique plus pragmatique s'impose, estiment les acteurs du secteur.
MYO contre RYO
Les MYO et le tabac en volume restent le groupe le plus important sur le marché des FCT, avec une part de marché d'environ 70%. Le marché suit la même tendance à la baisse dans les deux catégories: RYO -15,2%, MYO -17,2%.
Ventes frontalières contre ventes intérieures
Les ventes de tabac, en particulier de tabac à rouler, diminuent fortement d'une année à l'autre, tant sur le marché intérieur qu'aux frontières. Toutefois, la baisse en volume est beaucoup plus forte aux frontières. Il y a quelques années, les ventes frontalières représentaient encore plus de la moitié du volume total de tabac à rouler vendu en Belgique. D'ici 2024, cette part sera ramenée à environ 37%. Avec la forte augmentation des accises, ce déclin devrait se poursuivre, voire s'accélérer.
Les ventes frontalières ont chuté de 34% dans le canal RYO et de 23,3% dans le canal MYO. Le volume des ventes frontalières de RYO a été décimé ces dernières années, principalement en raison de la baisse des achats des Britanniques, mais aussi en raison du déclin dans les autres régions frontalières. Malgré ces chiffres robustes, les ventes frontalières restent une proportion importante des ventes totales de tabac (cigarettes 12%, RYO 19%, MYO 43%). La forte augmentation des prix réduit également les ventes intérieures, les consommateurs se rendant en effet à l'étranger ou dans le circuit illégal. Toutefois, le marché intérieur (RYO -9,4%, MYO -12%) reste plus robuste que les ventes aux frontières.
Droits d'accises
Les accises ont à nouveau fortement augmenté au début de l'année 2024. Le danger de cette évolution est à double tranchant:
- L'augmentation des accises sur le prix moyen d'un paquet de tabac à rouler est de 32,5% en 2024. Pour compenser cette augmentation, il faudrait une hausse de prix de plus de 4,2 euros par paquet de 50 grammes. C'est à peu près autant que la somme des fortes augmentations de prix des trois dernières années. Pour les cigarettes, le prix devra même augmenter de plus de 2 euros par paquet de 20 d'ici 2024. Si l'on tient compte d'autres augmentations de prix, comme celles des matières premières, cette hausse pourrait être encore plus importante.
- Cette augmentation de prix a eu pour effet de réduire la différence de prix avec la France et les Pays-Bas, mais de l'accroître avec le Luxembourg et l'Allemagne. Par conséquent, on peut s'attendre à une diminution des échanges transfrontaliers de la France et des Pays-Bas vers la Belgique et à une augmentation des échanges transfrontaliers de la Belgique vers le Luxembourg et l'Allemagne. Cela poussera donc les consommateurs à franchir davantage les frontières et augmentera également le commerce illicite.
Comme les fortes augmentations des droits d'accises de ces dernières années se sont traduites par de fortes baisses de volume, ces augmentations sans précédent auront à nouveau un impact négatif important sur le volume, en particulier dans les zones frontalières.
Alternatives
Outre la diminution des achats dans les pays voisins de la Belgique, le risque majeur de cette politique est que les consommateurs belges s'approvisionnent de plus en plus par des canaux alternatifs. La proportion d'emballages étrangers que l'on trouve aujourd'hui en Belgique est nettement plus élevée qu'avant la pandémie de corona, et la contrefaçon augmente également.
Moins de recettes publiques
Il s'agit d'une très mauvaise tendance pour les consommateurs et les commerçants, mais aussi pour le Trésor public belge. Bien que le gouvernement compte sur une augmentation des recettes provenant des accises sur le tabac, celles-ci sont en baisse. En 2023, les recettes des accises étaient inférieures de 235 millions d'euros à ce que le gouvernement avait prévu dans son budget.
La France et les Pays-Bas dans le même bateau
L'augmentation des accises sur les cigarettes aux Pays-Bas est similaire à celle de la Belgique et est même beaucoup plus importante pour le tabac à rouler. En France aussi, les accises et les prix ont augmenté de 0,50 à 1 euro. La différence avec les Pays-Bas reste donc faible pour les cigarettes mais augmente pour le tabac à rouler; en revanche, la différence avec la France se réduit. En Allemagne et au Luxembourg, les accises ne seront pas augmentées en 2024.
Dangers
Les dangers sont multiples:
1. En France, où les prix sont depuis longtemps très élevés, on estime que plus d'un tiers des cigarettes sont issues du circuit illégal, dont près de la moitié sont des contrefaçons. Reste à voir quel sera l'impact de la forte augmentation des droits d'accises, mais l'exemple de la France montre clairement les risques.
2. Dans le segment des cigarettes, on constate déjà une augmentation des produits illégaux en Belgique. On s'attend à ce que le tabac évolue dans le même sens... Environ 20% des paquets de cigarettes récupérés n'ont pas été achetés en Belgique, mais proviennent de pays moins chers tels que la Bulgarie, la Pologne ou la Turquie, ou sont des contrefaçons.
3. Cette évolution sera suivie d'une baisse de l'emploi dans les points de vente légaux. La baisse des recettes d'accises pèsera sur le budget et entraînera des augmentations d'accises encore plus importantes.
De la modernité dans les décisions politiques, s'il vous plaît
Les possibilités d'innovation dans le domaine des cigarettes et du tabac sont très limitées. Les nouveautés sont concentrées dans les catégories de produits sans fumée. Dans le monde entier, les fumeurs adultes se tournent vers les e-cigarettes, les produits du tabac chauffés et les sachets de nicotine; des produits qui pourraient représenter une opportunité à la fois pour les fumeurs et les détaillants. En raison de l'interdiction des sachets de nicotine et du fait que les produits du tabac chauffés ne sont toujours pas autorisés sur le marché belge, cette opportunité est largement manquée.
Comme la demande de sachets de nicotine et de produits du tabac chauffés existe et augmente en Belgique, les consommateurs potentiels doivent s'approvisionner à l'étranger ou par des canaux clandestins, tels que des sites web illégaux, puisque le détaillant belge n'est pas autorisé à les proposer. Il est donc important de moderniser la politique du tabac et de veiller à ce que ces meilleures alternatives soient disponibles sur le marché et que les consommateurs soient correctement informés à leur sujet. Les librairies et magasins de presse et de tabac sont l'endroit idéal pour ce faire.
Les librairies et les bureaux de tabac sont l'endroit idéal pour proposer aux fumeurs une meilleure alternative et les informer correctement
L'évolution
Petits paquets MYO
Avec cette baisse constante des ventes et toutes les interdictions qui rendent impossible la promotion ou la communication autour des produits du tabac, il est également logique que ce secteur ne bouge pas beaucoup au niveau des produits. Néanmoins, là aussi, on assiste à des innovations ou à des ajustements à droite et à gauche.


Dans le canal MYO (Belgique totale), la part des petites boîtes augmente en partie au détriment de la part des seaux de taille moyenne. Les boîtes moyennes restent le format d'emballage le plus vendu. Aux frontières, les seaux moyens sont les emballages les plus vendus, suivis par les grands seaux. Mais les bidons et les petits seaux gagnent des parts de marché au détriment des seaux de taille moyenne, probablement en raison de nouvelles augmentations de prix.
Sur le marché intérieur, plus de la moitié du volume de MYO vendu est un petit ou moyen bidon. Le petit bus gagne des parts au détriment du moyen. Certains fabricants souhaitent travailler davantage avec des seaux plus petits à l'avenir, ce qui devrait remédier au manque de place chez les débitants de tabac, en particulier après l'interdiction des produits alimentaires.
Paquets RYO refermables
Cette année, tous les paquets de shag de Van Nelle sont refermables. Cette fermeture à glissière permet de préserver la saveur et la qualité après avoir roulé une cigarette.
Moins de plastique
Chez Imperial Brands, le plus petit seau de tabac utilise moins de plastique (selon le format, 6,5% à 9,3% de plastique en moins). Les parois du seau ont été légèrement amincies.
Quantité de tabac par paquet
Une nouvelle réglementation sur les quantités de tabac par paquet est attendue à partir de 2025:
- Entre 30 g et 100 g: augmentation par 10 g;
- Entre 100 g et 1.000 g: augmentation par 100 g;
- Les paquets ne peuvent contenir moins de 30 g ou plus de 1.000 g de tabac.
Quoi d'autre?
- À partir de 2025, des encarts obligatoires sur les paquets de produits du tabac contenant des avertissements sanitaires seront également introduits.
- L'industrie s'attend également à une extension de la législation sur les emballages neutres à tous les produits du tabac.
- À partir de 2025, il sera interdit de fumer dans les établissements de santé, les écoles, les bibliothèques publiques et les transports publics professionnels, entre autres.
- Une directive sur les plastiques à usage unique entrera en vigueur cette année. La REP (responsabilité élargie du producteur) est un concept de gestion des déchets et de la pollution qui encourage les entreprises à concevoir des produits et des processus de production plus durables et recyclables. Cela entraînera toutefois des coûts élevés pour l'industrie, jusqu'à cinq fois plus élevés que dans nos pays voisins.
- À partir du 1er avril 2025, l'exposition de tous les produits à base de nicotine dans les points de vente devrait être interdite.
- À partir du 1er janvier 2025, les ventes de tabac seront interdites dans les festivals et les ventes de tabac B2C dans les supermarchés de plus de 400 m² seront interdites.
- À partir de 2025, les détaillants devront obligatoirement vérifier l'âge de tous les clients ayant l'air d'avoir moins de 25 ans.
En collaboration avec Japan Tobacco International, Imperial Brands, British American Tobacco et Philip Morris International

